
Nous étions encore quelques uns
Nous étions encore quelques-uns
À croire en la poésie
Oh, bien peu pour sûr
Mais néanmoins rebelles
À l’insensibilité de notre temps
Corsaires des temps modernes
Nous abordions les galions du snobisme contemporain
Un vers aiguisé entre les dents
Une balafre d’amour au cœur
Nous fantasmions au passé
Un futur trop peu certain
La poudre au visage
Une larme dorée
Au coin de la bouche
Que je les aimais
Ces enfants devins
Avec leurs gueules d’Apaches
Qui étaient mes frères d’armes
La ride de la vie cernait le visage de leurs livres
Une vieillesse de ne pas avoir assez dormi
De bien manger, bien rire, bien boire
D’y goûter et d’en être ivre
De ce trésor de vivre
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Mais les voilà partis
La rose en bouche
Rangé au fond d’un cimetière
Ou dans un petit meublé
Avec une ribambelle de marmots gueulards
Un temps-plein de misère
Et le blues délavé des printemps
Leurs utopies, leurs grands discours
Vendus avec leur baluchon de vagabond
Vendus avec leur fierté
Non, je ne les reconnais plus
Leur jeunesse a fané
Et ne reste que le souvenir
D’un baiser sec emprunt sur leurs lèvres
Et moi, sans trop d’explication
Je me suis retrouvé placardé
Au mur des égarés
Trois kopecks en poche
Et mes brouillons pour sécher mes souliers
Nous étions encore quelques-uns
À croire en la poésie
Oh, trop peu pour sûr
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